Pleine lune à pleine lune. Voici enfin venu le moment de me livrer sur ma 3e expérience d’enfantement. Pour toutes celles qui m’ont demandé des nouvelles mais, surtout, pour moi, pour me souvenir. Ma mémoire m’a toujours fait défaut et le souvenir de cette expérience s’étiole déjà. Le grand portrait reste imbibé dans mes cellules mais les contours s’effacent.

Alors… tout a commencé le soir de la pleine lune d’août, pleine lune en Verseau. Après quelques semaines à coup de 1-2 Braxton Hicks par jour seulement, j’ai su après 4-5 contractions en ligne -pas si douloureuses- que ça y était. Le travail avait réellement commencé. Il était alors 22h et je tentais de m’endormir. J’espérais que mon chéri vienne se coller mais il cuisinait une soupe qui a embaumé la maison toute la nuit. Lorsqu’il est finalement venu me rejoindre vers minuit cela faisait déjà deux heures que je pestais de ne pas pouvoir dormir, deux heures que je faisais le tracking des contractions pour essayer d’y déceler une certaine régularité.

Mon anémie était alors contrôlée mais j’avais encore une certaine fatigue et un grand besoin de sommeil. Vers la fin de la grossesse, je dormais facilement des nuits de 10h et je faisais une sieste d’1h30 en avant-midi… Alors la nuit blanche qui s’annonçait me faisait déjà craindre la fatigue à venir! (On s’habitue… j’écris ceci en pleine nuit avec une certaine lucidité et les yeux grands ouverts. Vive les nuits de pleine lune qui dérangent mon rythme de sommeil… et les nombreux réveils de bébé!).

Quand mon amoureux est enfin venu me rejoindre, je l’ai avisé que la nuit risquait d’être courte. Je lui ai suggéré de dormir, j’ai mis ma rose de Jéricho dans l’eau afin qu’elle s’ouvre en même temps que moi et m’apporte renaissance et persévérance. Puis, je suis allée prendre un bain chaud. Les contractions étaient rapprochées et douloureuses mais encore gérables.

Après un certain temps passé dans l’eau, j’ai enfilé ma robe de chambre et je suis descendue au rez-de-chaussé armée de mon cellulaire, ma playlist et mes écouteurs. Juuuste avant l’accouchement je suis tombée sur une playlist d’accouchement sur Spotify qui semblait intéressante. C’est ce que j’ai mis dans mes oreilles. C’est là-dessus que j’ai dansé, là-dessus que j’ai pleuré. Je sentais que je m’ouvrais au niveau du cœur. Je ne savais pas ce qui se jouait au niveau de mon col mais je me sentais vivante, vibrante, ouverte, accueillante. De nombreux souvenirs ont ressurgi à ce moment-là… des anciennes amitiés, des voyages, des partys, comme si je traversais à nouveau le pont en laissant derrière moi certaines choses, pour un certain temps du moins. Je m’engageais volontairement sur le chemin de la maternité avec les nuits hachées, l’allaitement constant, les responsabilités. Je devenais mère d’une “famille nombreuse” cette nuit-là et, dans le vertige que cela m’amenait, j’y trouvais aussi un certain réconfort car materner est un de mes rôles préférés, quasi inné dans mon cas. Mon soleil en Cancer probablement.

Vers 2h du matin, j’ai écrit un message aux femmes qui étaient présentes à mon premier blessingway (oui, j’ai eu la chance d’en vivre deux pour cette naissance!). C’est aussi à ce moment-là que mon chéri s’est fait réveiller par un bruit suspect comme une chute, suivi d’un splash. Aussitôt, il s’est levé et m’a cherché dans la salle de bain à l’étage, à côté de la chambre. Mon bain était encore plein mais je n’y était pas. Il y avait des traces d’eau partout. Il m’appelait et m’appelait mais je n’entendais rien. J’avais les oreilles pleines de musique! Il m’a finalement retrouvée au salon, assise sur le divan. Tout allait bien. Et c’est là qu’on s’est aperçu que le chat était mouillé bord en bord. Ce qui avait réveillé mon chum c’était le splash de la douchette et du chat qui sont tombés dans mon bain bien plein 🙂

J’ai profité du réveil de mon chéri pour lui dire de faire le set-up de la chambre pour l’accouchement. Ça devenait de plus en plus intense et je commençais à ressentir le besoin de l’avoir avec moi, présent, aimant, disponible. Pendant qu’il se démenait à installer le foutu plastique sur le matelas de notre lit, j’essayais de rester focus. Malgré moi, j’ai fini par l’aider et commencé à penser aux choses à faire pour être fin prêts à accueillir bébé. Ça m’a sorti de ma zone. Les questions aussi. Je ne voulais pas parler. Je voulais simplement être dans ma bulle.

Vers 4h30 du matin, j’ai enfin dit à mon amoureux qu’il pouvait appeler la sage-femme s’il le voulait. Deux précisions ici : Je dis bien la sage-femme et non ma sage-femme car, malgré mon bonheur d’avoir été suivie par la même équipe que les deux autres fois d’avant, mes sage-femmes à moi étaient toutes les deux en vacances au moment de la naissance. J’étais heureuse d’être assez en confiance pour ne pas en ressentir de trop grande déception. Et puis “s’il le veut” parce que tout le long de la grossesse, j’ai fait des rêves dans lesquels j’accouchais seule. Je m’étais informée sur les ANA (accouchement non-assisté) et j’étais en paix avec l’idée de n’être qu’avec mon chum pour l’enfantement. Ceci dit, lui n’était pas du même avis et il préférait avoir des sage-femmes avec nous. J’étais en paix avec ça aussi. Par contre, si on m’avait dit que l’accouchement à domicile était impossible au moment où on les appelait parce que trop de clientes étaient en travail en même temps et que je devais me rendre à la maison de naissance, j’aurais probablement donné naissance chez moi, seule. C’est tout de même bien moi qui accouche, ha!

À 5h13, la première sage-femme est arrivée. Elle m’a examinée, a écouté le cœur du bébé et a appelé rapidement la 2e sage-femme. La naissance était imminente. Les contractions étaient tellement fortes. Quelques phrases d’affirmation m’aidaient à les laisser passer mais ça devenait de plus en plus difficile de rester dans la danse et les chants. Je me sentais de plus en plus vulnérable. J’essayais de faire ma bulle mais c’était impossible… j’entendais et voyais tout autour de moi. J’étais si fatiguée que je somnolais entre les contractions. Les endorphines faisaient leur effet! Je suis retournée au bain -pendant que la sage-femme installait son matériel- avec mon chéri tout près qui me faisait des points de pression au dos depuis un moment déjà… (et qui n’arrêtera pas avant la naissance de notre petit homme, j’en ai même gardé des bleus!). Je m’accrochais à lui comme à une bouée. J’avais besoin de lui, de ses mains, de sa chaleur, de ses mots. C’était intense et je devais rester ancrée. Autrement, c’était la douleur qui prenait le dessus.

Je variais les positions : debout souvent, sur le ballon parfois, à quatre pattes dans le lit, couchée sur le côté… et c’est dans cette dernière position que j’ai ressenti une première envie de pousser à 6h42. C’est cette première poussée qui a fait crever la poche des eaux. Une belle rupture spontanée des membranes qui m’a fait changer de ton. Mes sons ont changé à partir de ce moment. Ils sont devenus plus profonds, plus sauvages, venant de plus loin. La sage-femme est alors revenue me voir pour évaluer le tout. Tout allait bien. Tout était parfait. Je m’embarquais donc, sans le savoir, pour un 38 minutes de poussée. Ça peut sembler long à certaines pour un 3e bébé mais c’est 1h20 de moins que pour mes deux autres accouchements alors c’est pratiquement rien pour moi 😉

On m’appliquait des compresses d’eau chaude sur le périnée. On me pressait le dos, les hanches. On m’encourageait doucement à l’oreille. Je sacrais. J’avais envie d’abandonner. Je pleurais. J’ai poussé debout, à quatre pattes et c’est couchée sur le côté, une jambe soutenue par une sage-femme, que j’ai finalement donné naissance. J’ai vraiment bien senti la tête de Maxence passer ainsi que sa petite main collée à son visage. Un bel anneau de feu qui m’a fait maudire la terre entière. Dire que j’ai lu tout plein sur les naissances orgasmiques, haha. La sensation du périnée qui s’étire à ce moment-là, c’est quelque chose! Et tout ça me semblait être une éternité dans l’instant. Après coup, à la lecture de mon dossier d’accouchement, je me suis rendue compte que le délai entre la présence de la tête à la vulve et la naissance complète était finalement très court… 2 minutes pour tout dire.

À 7h20, nous avons accueilli notre petit miracle, la plus belle des surprises, ce petit garçon tant désiré mais que je ne pensais jamais rencontrer. Nous avons accueilli sur Terre un joli bébé vigoureux de 8,3 livres qui a scoré un 10-10-10 au test Apgar et qui nous a démontré toute la force de ses petits poumons par de nombreux pleurs et cris. Il ne restait que le placenta à délivrer. Seule j’aurais géré différemment et c’est probablement le seul petit point noir au tableau. J’étais entourée d’une équipe de sage-femmes avec des protocoles à tenir. On m’a donc demandé de pousser même si je n’avais pas la moindre petite tranchée. J’ai voulu me redresser pour travailler avec la gravité mais on a refusé. Et finalement, le placenta est sorti de moi à l’aide d’une traction et d’une paire de pinces. Pas ce que j’avais souhaité pour cette portion. Mon instinct savait fort bien que je n’étais pas à risque d’une hémorragie et que j’avais encore du temps devant moi mais je n’avais plus l’énergie de faire front. C’est ma petite déception qui, heureusement, n’est pas venue teinter négativement mon expérience.   

Ça y était. Je l’avais encore fait. Je venais de donner naissance pour la 3e fois dans ma maison, avec mon amoureux. Je n’en revenais pas de toute cette beauté, toute cette intensité, toute cette force, toute cette chance que nous avions. Je n’en reviens pas encore.

Dans un prochain billet, je vous raconterai le postnatal et tout le reste. J’en ai encore tant à vous dire!